Dimanche 28 septembre 2014, comme à son habitude pour fêter la Petite Thérèse (Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus), la communauté du Carmel Saint-Joseph de Mechref invite amis et connaissances pour une matinée dominicale de retraite la plus proche du 1er octobre.
C'est avec une petite vingtaine personnes dont deux enfants que nous nous retrouvons dans la Chapelle du couvent, pour le lancement de notre matinée. Cette année, le thème est celui de l'offrande, de l'offrande de sa vie comme l'a écrite et accomplie Thérèse : "Aimer c'est tout donner et se donner soi-même".
Le texte choisi pour nourrir nos échanges et notre réflexion est celui de sa prière du 9 juin 1895 (Pri 6), qu'elle a intitulée : "Offrande de moi-même comme Victime d'Holocauste à l'Amour Miséricordieux du Bon Dieu". Thérèse a fait l'expérience de la miséricorde du Seigneur, dans sa vie toute simple de carmélite ; et à 23 ans, elle fait cet acte d'offrande par solidarité avec toute l'humanité pécheresse. Elle désire offrir sa vie et tout son être au feu de l'amour miséricordieux pour que cet amour enveloppe, pénètre et se déploie en tout homme si éloigné de Dieu et de l'Église soit-il, pour qu'il rencontre cette tendresse de Dieu qui nous sauve tous. Elle comprend que c'est au cœur de sa vie quotidienne "à chaque battement de son cœur" qu'il lui faut renouveler l'offrande de sa vie, en solidarité avec tous ses frères. Elle veut entrer pleinement dans la dynamique de l'offrande filiale, comme Jésus tout au long de sa vie (et tout spécialement sur la Croix) l'a vécue : "Père, entre tes mains, je remets mon esprit", lui qui est mort pour sauver tous les hommes.
Dans les temps apocalyptiques qui sont les nôtres, là où se déchaîne le Mal dans sa puissance de destruction et de division, sachons regarder aussi la révélation de la grâce à l'œuvre. C'est dans notre temps d'urgence et de violence que se lèvent des témoins qui ont rencontré cet amour miséricordieux, et veulent partager cette infinie tendresse et trésor de miséricorde de Dieu. "L'abîme appelant l'abîme" (Ps 41,8), c'est dans l'abîme des misères humaines que se déploie l'abîme des tendresses divines. Nous pensons, par exemple, au Père Franz de Homs, lumière qui rayonne sur tout le peuple syrien, comme phare dans la tempête, comme levain dans la pâte, ou comme grain de blé en terre.
En guise d'introduction à cette réflexion nous avons regardé trois cours extraits du film de Xavier Beauvois "Des hommes et des dieux" (film français de 2010), et lu ensemble le testament du Père Christian de Chergé (Prieure au monastère de Tibhirine en Algérie, assassiné en 1996). C'est la question de rester ou de partir, de quitter ou de vivre en solidarité avec le peuple et dans la terre où ils vivent qui est posée. C'est ce même et lourd discernement que se posent aujourd'hui bon nombre de Libanais dans la tourmente et la peur du terrorisme que nous subissons.
La peur, l'angoisse, le repli identitaire, les paralysies sont-ils de bons conseillers ? Ou bien existe-t-il une autre voie, comme celle inaugurée par sainte Thérèse et par le Frère Christian : entrer dans la dynamique de notre Dieu Sauveur, Vainqueur du mal, de la mort et de la méchanceté, qui se déploie ici et maintenant ?
N'avons-nous pas à vivre, nous aussi solidaires ? N'avons-nous pas aussi la mission de devenir témoins de tendresse et d’espérance pour tous nos frères de cette terre d'Orient ? N'avons-nous pas l'obligation de nous réveiller à notre responsabilité ... de réconforter, d'ensemble lutter pour plus de justice, de bonté, de tendresse, et de fraternité ? À travers ces écrits, ce film, nos échanges, quels appels percevons-nous du Seigneur, personnellement et communautairement pour aujourd'hui ?
Chacun des participants partira, nous l'espérons, avec une lumière, une perle, une parole d'espérance pour son chemin, à travers la prière commune, les échanges, les chants de l'Eucharistie. La messe célébrée ensemble, nous rappelle et nous fait vivre cette solidarité envers et contre tout, en nous donnant le pain et la force pour la route. L'homélie nous a rappelé que le Royaume est pour les petits, les humbles de cœurs qui dépossédés de toute richesse à la mesure du monde, reçoivent tout de l'Esprit Saint.
À 8h30 ce matin, il pleuvait sur Mechref, à 15h00 aux derniers "au revoir", un timide rayon de soleil perçait derrière les nuages, et le soleil de l'amitié en Christ brillait dans tous les cœurs.
Pour lire les textes choisis :
http://www.therese-de-lisieux.catholique.fr/Acte-d-offrande-a-l-Amour-Misericordieux.html